Pour les 25 ans de numéro 2, je nous ai fait plaisir : j'ai réservé deux fauteuils d'orchestre à l'opéra. Nous en rêvions, gamines. Depuis nos premiers galas de danse. Et nous y sommes allées il y a quelques semaines. En arrivant, premiers petits frissons en gravissant les marches de l'entrée, puis le grand escalier pour accéder à nos places grâce à une jeune hôtesse.
Passé le premier moment d'extase, je m'assois, et je lève les yeux... que je ne descends plus pendant un quart d'heure. Je l'avais déjà contemplé lors d'une première visite, mais planer sous ce plafond de Chagall avant un ballet... le bonheur.
L'heure approchant, la salle se remplit, et mon regard est attiré vers le décor peint qui nous dissimule la scène...
Jusqu'à ce que les lumières s'éteignent et que le silence se fasse pour laisser entendre un luth accompagné d'une voix féminine... le rideau se lève sur des danseuses habillées de noir.
Le premier ballet, Hark!, est d'Emanuel Gat, sur une musique de John Dowland (XVIIe). Et nous avons de la chance, c'est une première représentation mondiale.
Nous sommes sorties de ce premier ballet admiratives.
Petite pause d'une dizaine de minutes pour nous remettre des premières émotions, et on enchaîne sur le White Darkness de Nacho Duato. L'admiration croît encore devant les deux danseurs étoiles qui évoluent sur scène. J'aimerais vraiment pouvoir décrire tout ce que j'ai ressenti, mais c'est difficile d'évoquer les émotions que peut provoquer un simple mouvement. Je retiens la première arabesque et ce pied fléchi qui se tend lentement, seul mouvement sur toute la scène...
Et ces jeux avec le sable. Avec cette impression qu'il aurait suffi de souffler légèrement sur les danseurs pour qu'ils s'envolent... Autant de grâce et l'impossibilité de la représenter, c'est frustrant! Les 25 minutes du ballet se sont écoulées en quelques instants...
Après une entracte de 20 minute, pendant lesquelles nous errons dans les couloirs de l'opéra, nous nous rasseyons pour une heure. Au programme : MC14/22 "Ceci est mon corps" d'Angelin Preljocaj. Le rideau s'ouvre sur le curieux tableaux d'hommes enfermés dans une cage. Sur le devant de la scène, un homme lave un corps sans mouvement.
Dès le début j'ai été saisie par l'étrangeté du ballet. Cette sensation de déjà-vu, cette impression de rêver alors que l'on sait pertinemment être éveillé... Les lents mouvements de ces hommes produisaient un effet kaléidoscopique et il a fallu le sursaut des percussions pour me déshypnotiser.
C'est le ballet que j'ai préféré. Il était violent, dérangeant, parfois burlesque, parfois cruel. Mes émotions dansaient sur un ligne de funambule au gré des scènes représentées, des mythologies évoquées, des références chrétiennes détournées... Comment vous le décrire? Une atmosphère tenant de Caro et Jeunet, une musique étrange... Quelques larmes au détour d'un mouvement... quelques sourires sur un jeu de main... et c'était déjà fini.
Il a fallu sortir de la salle, encore frissonnantes, retrouver l'agitation de Paris, du métro. Nous avons eu du mal à redescendre sur terre, même après le restaurant japonais, même après une nuit de sommeil hantée par des rêves presque cauchemardesques.
J'ai désormais dans la tête des mouvements que je souhaiterais sous le pinceau...
Et je crois que j'ai trouvé un nouveau moyen de planer...
p.s. : Photos des danseurs : Ann Deniau, Enrico Bartolucci.
3 commentaires:
"Le bonheur d'avoir trouvé [t]a voix." Comme je te comprends, et que j'aime lire ça !
Et, au passage, très bel article, qui donne vraiment envie !
je suis heureuse pour toi et numéro 2, vous avez passé une soirée riche en émotion et c'est ce qui donne le piment à la vie.
Le cadre est vraiment magnifique et je comprends que l'on puisse facilement se laisser transporter. Merci de nous le faire partager.
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